Mon coeur de mère (bis)

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La fin de l’année 2013 m’a vidée. Je suis épuisée. J’ai été absente des interwebs parce que ma présence était requise dans la vraie vie. Que dis-je… exigée.

Par où commencer? Peut-être là je vous ai laissés, à la mi-novembre? J’ai vaguement mentionné des péripéties périlleuses… Bon. On a découvert que Léonie faisait de l’asthme comme sa grande soeur. Et oui. On pensait bien que ce serait différent avec elle. Que deux hospitalisations back à back en début de vie, ce n’était que de la malchance. Elle ne montrait pas les signes de la faiblesse pulmonaire d’Alice, une happy weezer dès ses premières semaines de vie. Mais une semaine avant le premier anniversaire de Petit Bébé, nous avons vécu un épisode épique et sans équivoque: elle a été hospitalisée pendant 7 jours. Encore un estifi de virus random qui a foutu le bordel dans des voies respiratoires trop fragiles. Hyper réactivité bronchique que ça s’appelle. Mais contrairement à Alice pour qui quelques heures dans un cocron en observation à l’urgence suffisait à casser sa crise, Léonie n’a pas été capable « d’en revenir » avec des doses habituelles de Ventolin. Elle a été transférée aux soins intensifs pour recevoir un traitement royal d’oxygène et de Ventolin en continu, en plus de sulfate de magnésium. Oui, SOINS INTENSIFS. Quand Jonathan m’a appris ça au téléphone (c’est lui qui était auprès d’elle, j’étais en route vers l’hôpital), j’ai eu des palpitations. Mon bébé aux soins intensifs? Ben non, ben non, BEN NON!

Et là vous l’apprendrez peut-être comme moi à ce moment-là: les soins intensifs, ce n’est pas nécessairement un synonyme de danger de mort. Ça veut dire que le patient doit être monitoré à chaque instant. Dans le cas de Léonie, tout le stock inhalé aurait pu provoquer de la tachycardie. Mais on n’a jamais passé proche de la perdre. N’en demeure pas moins que de la voir sortir de l’urgence, bébé minuscule sur sa grosse civière, entourée de gens et de machines, le masque à oxygène dans la face et les fils plogués partout… c’est mon coeur à moi qui s’est affolé.

Elle a passé trois nuits aux soins intensifs (avec Jonathan) et trois autres aux soins réguliers (avec moi). Son état s’est rapidement amélioré, puis elle a eu une rechute, pour finalement remonter la pente lentement. Nous sommes sortis de l’hôpital la veille de sa fête. Chère Léonie, c’est à ton tour, de te donner des pompes à chaque jour.

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Y’a jamais de bon moment pour tomber malade, mais là, c’était particulièrement mal choisi. Quelques jours auparavant, j’avais eu un meeting concernant le livre sur lequel Valérie et moi planchions depuis l’été. Il ne restait que trois semaines pour terminer les textes. J’avais déjà prévu travailler nuit et jour pour y arriver et v’là tu pas que ces nuits et jours sont consacrés à être au chevet de mon bébé (et préserver un semblant de vie normale pour l’aînée). Simultanément, mon chum avait lui aussi appris que le startup pour lequel il travaillait devait temporairement suspendre ses activités… et sa paie. Tout arrivait en même temps. Encore. Quand tu penses que la cour est pleine, y’a toujours de la place pour rajouter de quoi sur le top. When it rains, it pours, comme on dit.

Vous ne le croirez pas, mais on est retournés à l’hôpital la semaine passée. Cinq semaines tard, Léonie a été hospitalisée deux jours pour les mêmes raisons. C’était quelques jours à peine après son rendez-vous de suivi en pneumologie. À ce moment-là, elle n’avait aucun symptôme. Évidemment. Et par un drôle de hasard, nous sommes retournées dans la même chambre du bloc des maladies infectieuses où nous avions passé une semaine il y a un an.

Pis quand on est sortis de Ste-Justine, Jon, Alice et moi, on a pogné une gastro express de 24h.

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Aussi, en trame de fond, je me dois d’ajouter qu’on dort pas fort par chez nous. Quand elle va bien, Léonie fait le party au milieu de la nuit pendant deux heures. Elle hurle dans sa bassinette non-stop si on sort de son champ de vision. Pis Alice est pas couchable. La mettre au lit est une source de confrontation depuis toujours, mais là, c’est pénible. Fac même le soir ou la nuit, on ne sait pas si on aura une pause.

En fait, s’il y a autre chose qu’on a découvert au cours des derniers mois, c’est que notre aînée souffre d’anxiété. Son insomnie, ses crises de colère et son humeur de marde sont des appels à l’aide. Des façons de nous dire « abandonne-moi pas » pis « aime-moi plus fort » mais de façon contraire au gros bon sens d’un parent adulte et préoccupé par sa job pis son autre enfant malade. Suite à nos voyages du début octobre qui ont eu un effet dévastateur sur son comportement, on avait travaillé fort pour la réconforter et rétablir un cadre plus constant. Tout ça a sacré le camp quand Léonie a eu son séjour prolongé à l’hôpital. Le château de cartes s’est effondré. Jonathan et moi en sommes toujours à le reconstruire, un peu à tous les jours, en étant solides et calmes. En retenant notre stress devant elle, comme on retient son souffle. En cherchant de l’aide et du support. Câlisse qu’on est fatigués.

Pour la petite histoire, le livre est techniquement fini et le startup de Jonathan a trouvé un investisseur. Tout est bien qui finit bien? Mettons. Les bronches de Léonie matureront comme celles d’Alice et on devrait être sortis de l’hôpital dans 2-3 ans. Pis l’anxiété, ben on apprend à vivre avec. Et je devrais me réjouir qu’on est les quatre à la maison pour Noël pis mon sapin sent bon. Mais j’ai pas vraiment de fun. Mon coeur s’est tellement débattu qu’il réagit juste aux grosses émotions de ces temps-ci. Y’est magané.

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Je sais que je suis chanceuse malgré tout. Quand j’ai vu une petite fille chauve aux ascenseurs de Ste-Justine la semaine passée, je me suis cachée dans ma tuque et mon foulard pour brailler ma vie. Ça relativise tout. Pareil comme quand je pense aux mamans syriennes. Ou aux parents célibataires qui rushent à quelques rues de chez nous. Je me répète constamment que je suis choyée d’avoir un logis si confortable, une famille proche et des amis extraordinaires. Aussi, que je fasse une job que j’aime et que mes talents soient reconnus. Je le sais. Mais ça ne me « soulage » pas. Ce qui m’habite tout le temps, ce sont mes enfants qui sont pas bien. Ce sont mes filles qui ont besoin de moi, que je sois disponible pour aller à l’hôpital ou skipper la garderie pour gérer une crise. Je dois être là. Présente. Alice et Léonie ont besoin de leurs parents.

Parce que je dois absolument le mentionner, Jonathan est là. Toute là. D’ailleurs, c’est ma révélation de 2013: tous ces challenges nous ont rapproché. Ça fait 9 ans qu’on s’aime, mais on n’a jamais été aussi « ensemble ». Notre relation s’est approfondie. Unis dans l’adversité. C’est drôle à dire, parce que l’adversité vient direct de l’intérieur de notre noyau familial, mais on est des partenaires de feu.

Fac je lâche pas. Je suis là, même si je suis brûlée. Même si mon coeur est confus d’être si sollicité, que l’abnégation est mon deuxième nom, que je ne vois pas la fin de cette saga. J’ai laissé la frustration de côté pour garder toutes mes énergies. Un jour, j’aurai une nuit normale. Un jour, je pourrai suivre ce qui se passe dans le monde. Un jour, je sortirai avec mes amies. Un jour, je partirai en voyage avec Jonathan. En attendant, j’endure et je dois durer.

Tout ceci passera. Je pense que je vais me le faire tatouer dans le front. Mais jamais je n’aurais imaginé que mon expérience de la maternité aurait pu être aussi exigeante. J’ai l’impression d’avoir vieilli de 5 ans depuis la dernière année. En maturité pis en cheveux blancs.

Étant donné qu’on est le 24, je vous souhaite un très joyeux Noël. Évidemment de la santé à la pelletée. Serrez vos p’tits fort fort, très souvent.

Amour et solidarité.