L’art de l’abnégation
Bon. Bébé est dans sa chaise qui fait brrr brrr*, ça veut donc dire que j’ai les deux mains libres pour taper sur mon clavier. Sans blague, j’ai l’impression qu’on m’a amputé d’un bras, ou plutôt qu’on m’a greffé un nouveau-né dans le creux du coude, depuis qu’elle est là.
Pis? Comment je trouve ça être une nouvelle maman?
Bof.
Et bien, le buzz de la nouveauté s’est dissipé et je comprends maintenant toute la portée du mot « abnégation ». Sans blague, c’est fucking exigeant s’occuper d’un bébé tout neuf, complètement dépendant de toi. C’est probablement la chose la plus difficile que j’ai eu à faire. Des fois, je me sens sur une job de gardiennage éternelle et bénévole où les parents auraient oublié de revenir. C’est cliché mais tu donnes, tu donnes, tu donnes, sans rien recevoir en retour. OK elle sourit quelque fois, elle fait des drôles de sons, ça fait du bien… mais ça compte même pas: elle le fait pas consciemment!
Je m’attendais à être très fatiguée à cause du manque de sommeil. Mais je ne m’attendais certainement pas à ce qu’un bébé me force à puiser aussi creux dans mes ressources psychologiques. La routine d’allaiter et de changer des couches 8 à 12 fois par jour devient abrutissante. Tu t’adaptes à mille situations nouvelles et à un rythme qui n’est pas le tien. Tu te questionnes constamment sur le comportement de ton bébé : qu’est-ce qu’elle veut? est-ce que c’est normal? est-ce qu’on devrait faire ça ou ça? Et j’ai vraiment sous-estimé le baby blues. Cette satanée chute d’hormones me fait brailler à tous les jours depuis au moins une semaine.
Comprenez-moi bien. J’aime mon enfant, mais je peux pas dire que je trippe. Quand on me dit « profite bien de ces beaux moments » je me demande bien de quels beaux moments il s’agit. Nettoyer une flaque de vomi sur le divan? Se faire pisser dessus? Avoir les mains ultra sèches à force de les laver? J’ai jamais autant regardé de mauvaise télévision et je peux difficilement sortir à cause de ma césarienne.
OK je chiale beaucoup, mais je sens qu’on a essayé de m’en passer une petite vite quand on m’a décrit le grand bonheur instantané d’être une mère. Pour le moment, ma fille et moi apprenons à nous connaître et je m’attache tranquillement à cette bibitte qui sent bon mais qui ne parle pas.
En attendant, mon mari est un roc (sans blague, il est parfait, autant avec sa fille qu’avec moi) et à chaque jour qui passe, ça va de mieux en mieux. Je m’extasie quand elle fait son rot, je suis fière qu’elle prenne du poids et je me tanne pas de la regarder. C’est aussi ça être une nouvelle maman.
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* Finalement, ce billet a été écrit sur deux jours en trois périodes distinctes…